Les Crinoïdes

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  Echinoderme, crinoïde

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 couronne

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 calice

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 pédoncule

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 partie radiculaire

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 partie anale du tube digestif

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 bras

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 pinnule

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 sillon ambulacraire

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 orifice buccal

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 orifice d'excrétion

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 plaques brachiales

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 plaques radiales

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 plaques basales

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 plaques infrabasales

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 article du pédoncule

PELMATOZOAIRES

Le terme Pelmatozoa  a été proposé en 1848 par Leukart pour les animaux pourvus d’un pédoncule (pelma , en grec). Ce sont des Échinodermes caractérisés par leur mode de vie. Fixés, au moins pendant une partie de leur existence, ils s’opposent aux Eleuthérozoaires (Hélicoplacoïdes du Cambrien inférieur, Échinides, Astérides, Holothurides), dont la vie est libre.

Les Pelmatozoaires, quoiqu’ils proviennent de plusieurs phylums, ont en commun l’adaptation à une niche écologique particulière: ce sont des animaux benthoniques microphages filtreurs et fixés. Leur fixation, qu’elle se fasse par un pédoncule ou par la base du corps lui-même, a une grande importance anatomique et biologique. En principe, ces animaux sont dépourvus d’organes locomoteurs. Leur face orale est orientée vers le haut et pourvue d’organes capables de diriger des courants nourriciers vers la bouche: des brachioles ou des bras et des sillons nourriciers ciliés conduisent vers le tube digestif des particules nutritives fines (microphagie), cependant que les plus volumineuses sont rejetées par ce dispositif de filtrage. L’anus est généralement situé à la face orale.

On divise les Pelmatozoaires en deux ensembles ou sous-phylums. Un premier sous-phylum contient les Carpoïdes ou Homalozoaires, dépourvus de symétrie radiaire mais offrant une symétrie bilatérale; ils sont tous paléozoïques (apogée à l’Ordovicien). L’autre sous-phylum est celui des Crinozoaires, pourvus d’une symétrie radiaire apparente tendant vers une symétrie d’ordre 5 ou, plus rarement, 3 dans certains types archaïques. Les Crinozoaires comprennent: les Cystoïdes, tous paléozoïques, ayant eu leur apogée à l’Ordovicien, et les Crinoïdes, dont l’acmé se situe un peu plus tard, du Silurien au Carbonifère. Les Crinoïdes sont les seuls Pelmatozoaires qui, après avoir survécu pendant l’ère secondaire, sont encore représentés dans les mers actuelles.

Les Crinozoaires

La comatule actuelle

Le Crinoïde actuel le mieux connu est la comatule, Antedon , qui vit sous les pierres de la zone littorale; fixé à l’état larvaire, l’animal perd son pédoncule à l’âge adulte. Cependant, il présente les autres caractéristiques des Crinoïdes. En effet, le corps est enfermé dans une thèque , qui consiste en un calice ou coupe dorsale, formé de plusieurs cycles de plaques: basales, radiales et orales. Ces dernières régressent lors de la transformation de la larve en adulte (fig. 1), en même temps qu’apparaît le cycle des plaques brachiales dans le prolongement desquelles se développent les bras.

Ces derniers, articulés et très souples, sont parcourus ventralement par un sillon où se trouvent les canaux ambulacraires pourvus de tentacules. Les bras portent latéralement de petits brachioles articulés, les pinnules, lesquels renferment les gonades. La face ventrale est recouverte d’une membrane plus ou moins incrustée de plaques calcaires, le tegmen, étoilé par les sillons ambulacraires et perforé par de nombreux hydropores. Au centre s’ouvre la bouche; non loin se place l’anus à l’extrémité d’un tube proéminent. Du côté opposé au centre de la coupe dorsale, une pièce saillante, la centro-dorsale, est un résidu du pédoncule larvaire. Elle porte des expansions articulées, ou cirres, qui sont utilisées pour l’ancrage de l’animal. L’un des ambulacres, la bouche et l’anus s’alignent selon le plan de symétrie bilatérale du squelette.

Le pédoncule (qui n’existe chez l’Antédon qu’à l’état larvaire) est une extension du corps composée de pièces dites columnaires en forme de disque ou pentagonales, empilées et articulées les unes sur les autres. Ces pièces peuvent être semblables entre elles ou différentes, selon un rythme plus ou moins régulier. L’axe du pédoncule est occupé par le prolongement non calcifié d’organes intrathécaux: la glande axiale et des troncs nerveux. Les pièces columnaires abondantes dans certains calcaires, dits à «entroques» (cf. planche en noir, CALCAIRES), sont en réalité formées initialement par la coalescence de cinq pièces (d’où la symétrie 5 évidente dans le type pentacrine). Divers dispositifs d’ancrage ont été réalisés chez les Crinoïdes paléozoïques à partir du pédoncule.

Classification

 Les Éocrinoïdes  sont les plus anciens Crinozoaires ; ils sont apparus au Cambrien inférieur. La thèque est un sac arrondi, prolongé par un appendice dorsal plus ou moins allongé faisant fonction de pédoncule mais non formé de columnaires. Les plaques thécales sont généralement ajourées par des canaux ou de grands pores traversant les sutures et dessinant le réseau des organes périphériques nerveux et sinusaire. Il y a des brachioles, parfois disposés en touffes. La symétrie 5 est imparfaite.

 Les Crinoïdes  proprement dits, apparus au Trémadoc supérieur, sont représentés pendant l’ère primaire par des formes très diverses, généralement à symétrie 5, à long pédoncule bien distinct de la thèque et à bras très ramifiés. Chez les Camerata , la bouche reste cachée à l’intérieur de la thèque et elle est alimentée par des canaux prolongeant les bras. La plupart des formes se laissent classer selon que la coupe dorsale possède un (monocycliques) ou deux (dicycliques) cycles de plaques basales. Chez les Inadunata , la symétrie est souvent irrégulière. Chez les Flexibilia , les plaques de la thèque s’articulent les unes sur les autres, tandis que les bras sont moins divisés: ce sont les moins passifs des Crinoïdes. Tous les Crinoïdes postpaléozoïques sont des Articulata .

D’intéressantes spécialisations ont affecté les Crinoïdes; par exemple, au Dévonien, l’Ammonicrinus  est capable de s’enrouler comme un Cloporte (adaptation à la zone tidale) et les Crotalocrinidés construisent de petits récifs; plus tard, à l’ère secondaire, les Cyrtocrinides Uintacrinidés sont dépourvus de toute fixation.

 Les Cystoïdes  sont des Crinozoaires apparus au début de l’Ordovicien et paléozoïques exclusivement. Leur nom évoque leur forme de vessie; leur thèque, très solide, ne présente pas d’autre symétrie radiaire que celle que peuvent offrir les sillons nourriciers aboutissant à la bouche. Les plaques sont perforées soit par des pores menant de l’extérieur vers l’intérieur et souvent unis en paires (diplopores des Diploporites et des Amphorides), soit par des canaux transsuturaux (rhombes des Rhombifères). Ces pores et ces canaux abritaient des organes périphériques sensoriels ou respiratoires. Chez les Pectinirhombifères, certains des systèmes de canaux transsuturaux s’enfoncent en faisant saillir le squelette à l’intérieur de la thèque sous la forme de plis très profonds. Les Cystoïdes offrent plusieurs tendances dont certaines semblent avoir mené à d’autres classes.

Les Amphorides ont une thèque parfois inégalement épaisse, voire en partie souple, incrustée de petites plaques. Les pores correspondent à des canaux fréquemment ramifiés; certains sont des diplopores. Les sillons nourriciers sont souvent au nombre de quatre, obéissant à une symétrie bilatérale. Il peut y avoir une plaque madréporique complexe. Les Amphorides de l’Ordovicien sont groupés dans une province comprenant l’Europe moyenne (à l’exclusion de la Scandinavie) et l’Afrique du Nord, ainsi que le sud de l’Asie; c’est-à-dire la zone tempérée de l’époque.

Les Diploporites ont deux tendances que révèle la disposition des diplopores. Chez les Astéroblastidés, les diplopores se groupent dans les plaques avoisinant la bouche et les sillons nourriciers. La thèque peut s’allonger et passer à un véritable pédoncule (Herpetocystis ): on est là au seuil des Blastoïdes. Chez les Protocrinidés, les diplopores tendent à se grouper le long des sillons nourriciers qui s’allongent; on est tout près des Échinides, c’est-à-dire que ces Échinodermes tendent à abandonner le comportement des Pelmatozoaires pour celui des Eleuthérozoaires.

 Les Blastoïdes  sont connus de l’Ordovicien au Permien; ils groupent des thèques pédonculées dont les plaques sont disposées régulièrement suivant une symétrie 5. La bouche est entourée de plaques orales et d’hydrospires enfoncées sous le test et communiquant avec l’extérieur par un pore (spiracle). La fonction des hydrospires reste énigmatique (respiration, équilibre osmotique et aussi inclusion de gonades).

 De petits groupes voisins des Cystoïdes sont rapportés aux Crinozoaires: ce sont les Lépidocystoïdes du Cambrien inférieur, puis les Paracrinoïdes sans pores, les Parablastoïdes et les Édrioblastoïdes de l’Ordovicien.

Les Carpoïdes ou Homalozoaires

Les Carpoïdes (Cambrien-Dévonien) étaient des êtres plats dont les affinités restent indécises. Tous possèdent un ou deux prolongements thécaux devenus soit un pédoncule ou une queue, soit un appendice brachial. Les Carpoïdes comptent trois classes : les Cincta  (Homostelea ), les Stylophora  (Cornuta  et Mitrata ) et les Homoiostelea  (Soluta ).

 Les Cincta , limités au Cambrien moyen de la Bohême, de la Montagne Noire, de l’Espagne et du Maroc, sont formés d’une thèque discoïde, cerclée d’un cadre solide de plaques marginales au nombre de dix à douze, le reste étant composé de deux membranes, l’une supérieure, l’autre inférieure, incrustées de plaques (Trochocystites ). L’anus marginal est recouvert d’une plaque (opercule); la bouche, qui s’ouvre à côté, reçoit des canaux qui rainurent le cadre marginal. Un appendice brachiolaire prolonge le cadre marginal à l’opposé de l’anus: il paraît avoir eu le rôle d’une queue.

Il semble qu’une filiation puisse amener aux Cincta  à partir des Stromatocystitoïdes de type Eikosacystis .

 Les Stylophora  ont duré du Cambrien moyen au Dévonien moyen. Ils sont pourvus d’un cadre de plaques marginales autour d’une face inférieure et d’une face supérieure, incrustées de plaques calcaires. À la face inférieure, le cadre est consolidé par une barre jugale. À la face supérieure, des pores transsuturaux ou des fentes à structure plus ou moins brachiolaire ont un rôle qui reste énigmatique: fentes branchiales, orifices buccaux, pores génitaux? Il existe un organe brachiolaire interprété par G. Ubaghs comme un «aulacophore» canalisant l’apport de nourriture à la bouche. Son insertion est opposée à l’anus.

La ressemblance entre les fentes et les pores accessoires de Cothurnocystis  et des fentes branchiales avait amené Gislén à comparer cet animal aux Chordés. En 1968, R. P. S. Jefferies proposa de situer les Stylophores dans un sous-embranchement des Calcichordés: ce groupe aurait possédé des équivalents de la notochorde, du cordon nerveux dorsal, un centre cervical et même des nerfs aboraux qui auraient quelque ressemblance avec les nerfs crâniens.

 Les Homoiostelea  forment un groupe connu du Cambrien supérieur au Dévonien inférieur. Le corps présente une forme rendue plus souple par l’absence d’un cadre solide de plaques marginales. Il existe deux organes brachiolaires dont l’un est un brachiole buccal, amenant la nourriture à la bouche, et l’autre, un appendice caudal.

 

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© 1997 Encyclopædia Universalis

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